mercredi 24 septembre 2008

Copie Originale

Avant même sa sortie officielle, la nouvelle série Taja (타짜) sur la chaîne télévisée SBS fait parler d’elle :

“C’est presque identique au poster du film hollywoodien!” signale un internaute sur un forum web. Réponse de la boîte de production : “seule l’ambiance est similaire. Cependant, (nous tenons à dire que) nous n’avions jamais vu le poster de ce film auparavant”.



Vraiment? Hasard malencontreux? L’affiche ressemble pourtant comme deux gouttes d’eau à celle de Promesses de l’Ombre, un film de David Cronenberg. Le film (à ma connaissance) n'est pas sorti sur grand écran en Corée du sud. L’année dernière, des faits similaires ont été remarqués avec le film Attack On The Pin-Up Boys (꽃미남 연쇄 테러 사건) qui copie outrageusement la couverture du DVD du groupe de rap américain Beastie Boys. Quant au film The President’s Last Bang (그때 그사람들), ce dernier reproduit presque fidèlement la jaquette d’un album de Blur.



Bref, les exemples ne manquent pas en Corée du sud. Un professionnel de l’industrie avoue même que “plus les films ont des coûts de production serrés plus les cas de plagiat deviennent nombreux”. Un fabriquant d’affiches explique que “si les budgets deviennent limités, les producteurs de films ne peuvent pas faire appel aux meilleurs photographes et designers et ils auront tendance à copier aisément les oeuvres étrangères”. Il faut savoir que les frais artistiques représentent entre 5 et 10% du budget marketing d'un film. Pour les séries télévisés, c’est presque 10 à 20 fois moins. Difficile dans ces conditions de recourir aux agences de création. Le pire étant que ces boîtes de production n'ont pas conscience des risques encourus. Résultat des courses, elles se retrouvent poursuivies pour plagiat ou contrefaçon. Dans certains cas, les dommages et intérêts réclamés dépassent les dizaines de millions de dollars.

La Corée du sud est pourtant membre de l'Organisation Mondiale du Commerce depuis sa création en 1995. Depuis le Cycle d'Uruguay, qui s'est tenu entre 1986 à 1994, les pays adhérents au GATT et, donc de facto à l'OMC, doivent faire respecter les droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce de manière appropriée sur leur territoire. Ces droits comprennent entre autres les droits des auteurs d'oeuvres littéraires et artistiques (livres et autres écrits, compositions musicales, tableaux, sculptures, programmes d'ordinateur et films) qui sont protégés par ce que l'on appelle le droit d'auteur pendant au moins 50 ans après le décès de l'auteur.

Hélas, la Corée du sud a gardé ses mauvaises habitudes d'antan et les oeuvres artistiques des pays occidentaux sont principalement touchées. La musique en particulier. Faites le constat par vous même du clip Get Ya de Lee Hyori, hit coréen en 2006, largement inspiré de Do Something de Britney Spears. Les auteurs de la star américaine via Universal Music Publishing Korea ont d'ailleurs porté plainte pour plagiat.





Et encore, ce n'est rien. La K-Pop des années 90 reprenait parfois, sans complexe, la mélodie entière des meilleurs tubes du Billboard Top 100 (l'équivalent américain de notre Top 50, émission défunte de notre jeunesse). Quant à la diffusion d'une oeuvre musicale dans un but commercial, pas besoin de verser un sou au compositeur original, même lorsque l'on est une grande entreprise. Kookmin Bank, le premier réseau bancaire coréen, a dû retirer une publicité en 2007 suite à la plainte déposée par l'artiste libano-anglais Mika pour avoir utilisé sans autorisation une de ses chansons. Le paiement des droits à la SACEM constitue une évocation utopique pour un coréen, de l'ordre du surréalisme.

Pourtant, tout ceci est bien regrettable car les coréens, capable également de belles choses dans de nombreux domaines, se sont fait prendre à leur tour au jeu de l'expropriation intellectuelle. Pucca, Dooly, et d'autres célèbres personnages "Made in Korea" ont acquis une forte popularité en Chine. A tel point que des entreprises de commerce chinoises avaient enregistré sans complexe ces oeuvres intellectuelles à l'INPI chinoise. La commission du copyright coréen s'est ainsi lancé en 2007 dans un vaste programme d'enregistrement d'oeuvres coréennes en Chine avec la coopération des autorités locales afin de remettre les choses dans l'ordre.

Mais quid de la protection des oeuvres artistiques en général? Tant que la Corée du sud ne disposera pas de structures concrètes basé sur le droit à la propriété intellectuelle (à l'instar de la SACEM en France ou le BMI aux Etats-Unis dans le domaine de la musique), il ne sera pas facile de sensibiliser le public coréen, très peu au fait de ce droit. Difficile de surcroît dans un pays où le piratage est roi.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est vrai qu'il y a malheuresement beaucoup de plagiat en Corée et qu'ils ne se l'avoue pas toujours... Cela dit faut relativiser, il y a aussi énormément d'oeuvres original et d'artistes qui ne font pas de plagiat.

A l'inverse, des tonnes de chansons coréenne sont plagié en chine, en thailande voir au Japon. Tandis que les boites hollywoodienne rachète les droits (du coup c'est du plagiat légale) de films coréens pour en faire des remake (my sassy girl, il mare, JSA, my wife is a gangster, etc.)

- Daegann -

julien a dit…

Un truc genial c'est que quand je bossais a l'ambassade, des gus (ils se reconnaitront) sont alles voir keumhwang et leur ont propose des fichiers karaoke en francais (une trentaine de titres qu'on avait choisi lors de nos longues journees de travail). le projet a capote car keumhwang voulait payer des taxes dessus et du coup ca a ete trop complique. on leur a pourtant assure qu'on demande rien et que s'ils avaient des emmerdes ils pourraient les retourner contre nous...